Genius

On n'arrête pas la technologie. Jamais. Telle la lèpre sur le corps d'un pauvre, elle progresse, implacable.C'est ainsi que dernièrement, bravant tous les interdits et repoussant les frontières de la connaissance, les savants fous d'iTunes ont donné naissance à une application magique : Genius. Maintenant, un petit gnome se balade dans mon ordinateur et parcourt toute ma bibliothèque musicale, pour me proposer de découvrir des morceaux ou artistes qui pourraient me plaire -et il n'en profite absolument pas pour me dénoncer auprès de Big Brother comme un pirate patenté, non, ça serait contraire à son éthique de gnome.

Au fait oui, c'est comme ça, j'ai décidé que c'est un gnome, parce qu'il n'y a pas que les lutins dans la vie.

J'ai un peu de mal à faire confiance à ces suggestions, "vous avez aimé (...), nous vous conseillons (...)" : un jour où je regardais les conseils personnalisés d'Amazon, j'étais tombé sur "Infirmières Salopes III", ou un truc dans le genre. Un peu interloqué, j'avais cliqué sur "pourquoi nous vous conseillons cet article ?", qui est quand même un bonne question, vous avouerez (parce que bon, les infirmières salopes, c'est pas vraiment mon truc). Et là, le gnome d'Amazon m'avait répondu : "parce que vous avez regardé cet article : 'Les Bronzés font du ski'".

Perplexe, j'avais décidé qu'à partir de dorénavant je me conseillerais plutôt moi-même, parce que si c'est pour dire ça, je peux le faire tout seul.

J'ai fini par craquer. Hier soir, par curiosité et ennui, je suis allé voir ce que Genius me proposait, au vu de mes goûts musicaux. Je n'ai pas été déçu.

Bien sûr, j'écoute de la merde : j'ai du L5, du High School Musical (parce qu'on peut écouter "Humu Humu Nuku Nuku Apua'a" en boucle sans jamais s'en lasser !), et il est possible qu'en cherchant bien, on trouve un peu d'Emma Daumas. Mais merde, j'écoute aussi des trucs d'homme, en plus de Kylie et Madonna j'ai plein de Green Day, d'Oasis, de Britney, et même un peu de Silverchair et de Nirvana, parce qu'au fond je suis trop grunge et underground -à cela près que je choisis de me laver les cheveux et de ne pas mettre de tipp-ex sur mes chaussures.

Alors je ne vois pas, mais vraiment pas où cet enculé de bâtard de gnome est allé me chercher ça, et je proteste, avec toute l'énergie du désespoir :

On n'arrête pas la technologie. Mais parfois, quand même, on devrait.