Seul contre tous
Ce soir, j'étais chez Papaprocellus, à me plaindre de ce que mes poches étaient déchirées. À une époque, j'aurais sûrement essayé de pleurnicher pour l'attendrir, que c'est l'hiver, que j'ai des trous dans mon blouson, que je risque de mourir comme la petite marchande d'allumettes, ouin, mais j'ai fini par comprendre que rien ne peut fissurer le coffre fort de Papaprocellus.
Alors j'ai décidé de me prendre en main, et je lui ai plutôt demandé vers quel commerçant il faut se tourner pour faire réparer la doublure de ma poche.
Belle-maman est arrivée elle aussi, et ils se sont tous les deux penchés sur mon blouson pour voir l'étendue des dégâts.
Et le verdict est tombé :
Comme Ingrid me l'a appris, je jette la tête en arrière, je plisse les yeux et j'éclate de rire, en réponse à cette bonne blague.
Et je me reprends.
La même réponse, mais cette fois-ci, belle-maman met la main dans la poche et plie le tissu de la doublure, pour me montrer comment coudre en fermant le trou.
Doucement, le voile se lève, et je comprends qu'ils ne plaisantent pas. Je dois le faire tout seul.
Mais c'est pas possible !
Et le cordonnier ? Et je sais pas moi, la costumière, y'a pas quelqu'un dont c'est le métier de réparer les trous dans les poches ?
J'étais mortifié, cloué sur place.
Mais dans quel monde on vit ? Les gens veulent plus bosser, ou quoi ?
J'ai bien cru que j'allais devoir me mettre à coudre, moi qui ai déjà du mal à utiliser une fermeture éclair sans la casser, mais finalement, devant mon air atterré, ou pour essayer de me faire bouger du milieu du salon où j'étais encore scotché, belle-maman a gentiment proposé de me le faire "la prochaine fois que je viendrai dîner".
On n'a rien sans rien.